Réélu jeudi dernier président de la Fédération française de triathlon, Cédric Gosse nous a accordé une interview moins de 24 heures après afin de revenir sur ses quatre premières années à la tête de l’instance nationale et se projeter sur son second mandat. Plusieurs dossiers importants l’attendent dès le début de l’année 2025 et il les a déjà inscrits dans son agenda. 

Que représente cette réélection où vous étiez le seul candidat ? 

Cette élection est, malgré tout, très importante pour moi. Tout d’abord, elle confirme la confiance et la reconnaissance du travail qui a été fait sur les quatre dernières années. C’est un signe assez important. Le deuxième point est que nous avons fait un choix très fort en termes de démocratie et de gouvernance en donnant le pouvoir aux clubs à toutes les assemblées générales. C’est une démocratie directe où les clubs peuvent très clairement s’exprimer et le taux de participation a, quand même, été très correct (63,93 %). Cela veut dire que les clubs se sont saisis de cette évolution. 

Personnellement, depuis quatre ans, je vis une aventure extraordinaire. C’est une très belle fédération avec des clubs très engagés et des bénévoles passionnés. J’ai à la fois une grande fierté et un grand plaisir à présider cette fédération. Il n’y a pas que des moments faciles, mais j’ai une superbe équipe avec une très bonne ambiance, ce qui est aussi très important. On travaille dans le respect des uns et des autres, et dans l’écoute avec des débats qui sont constructifs. J’apprécie beaucoup cette réélection. 

Votre liste n’a que légèrement changé par rapport à votre première élection. Le nouveau mandat est-il sous le signe de la continuité ?

Sept nouvelles personnes sont dans ma liste, dont cinq femmes. Et oui, il y aura de la continuité. On ne va pas aller déstructurer des choses qui ont fonctionné au cours de ce mandat. On va essayer de les optimiser et d’apporter de la nouveauté. 

Quelles seront ces nouveautés ? 

La fédération doit rester très à l’écoute de ce qu’il se passe sur le terrain. C’est vraiment ce que je veux privilégier, avec la mise en place d’un observatoire des pratiques afin de faire remonter ce qu’il se passe sur le terrain et ce qui marche. Je suis persuadé que nous n’allons pas inventer des choses. Je me suis beaucoup déplacé au cours de mon premier mandat et j’ai vu des choses formidables, avec des initiatives tout à fait remarquables qui méritent d’être remontées pour servir d’exemple. 

Que vous disaient les clubs quand vous alliez à leur rencontre ?

Ils me parlaient des carences au niveau de l’encadrement, avec un besoin d’avoir des entraîneurs qualifiés. Donc il faut que nous poursuivions nos efforts en termes de formation des entraîneurs. C’est primordial.

Ils ont une autre requête, mais qui est plus difficile pour la fédération, qui est le problème des créneaux de natation. Je relaye cette information aux ministres, à la direction des Sports ainsi qu’aux députés et aux sénateurs que je vois pour les sensibiliser au manque d’infrastructures et la vétusté de nos piscines. Ce sont surtout ces deux sujets-là qui reviennent.

Dans votre document de campagne, vous expliquez que vous voulez être davantage représenté dans les instances nationales et internationales. Le fait que le triathlon ait brillé l’été dernier aux Jeux olympiques et paralympiques permet-il d’être plus facilement entendu ?

Oui, vous avez une écoute plus attentive, c’est indéniable. Notre fédération est reconnue comme une fédération performante et elle l’était déjà avant les Jeux olympiques et paralympiques. Alors, après les excellents résultats, le regard s’est encore plus aiguisé. Mais c’est le résultat de plusieurs années de construction. Le travail sur la performance et la haute performance a débuté en 2008 et je ne veux pas prendre tous ces résultats pour moi. Je récolte les fruits de toutes ces années. 

J’ai parfois entendu que les médailles ne faisaient pas tout. C’est vrai, mais quand on en a, ça aide beaucoup et je le mesure depuis le mois de septembre. J’ai eu l’occasion de rencontrer des ministres, des sénateurs et des députés et ils me disent “Vous êtes un sport formidable » ou « Vous êtes une belle fédération ». Dans les instances, il y a plus de crédibilité. Quand vous parlez, on vous écoute plus. 

Au niveau international, la fédération française pèse-t-elle suffisamment ? 

Nous avons deux élus à World Triathlon. Bernard Saint-Jean, qui est actuellement mon directeur de cabinet, est à l’Executive Board (le conseil d’administration), et Yannick Bourseaux est à la commission para triathlon.

Mais ce n’est pas assez. La France est le premier pays du triathlon. En prenant nos résultats, nous sommes au plus haut niveau en Europe et dans le monde. Notre présence doit être plus importante dans les instances internationales. Ce sont des luttes d’influence avec un rayonnement très important. Il faut que nous soyons plus présents. 

Je vais vous donner un exemple. Les Anglais, les Allemands, les Australiens et les Néo-Zélandais, quand leurs équipes se déplacent, il y a les athlètes, le staff et les élus. À chaque fois, ils ont trois ou quatre élus. Et ces trois ou quatre élus, pendant trois jours, ils ne font que parler avec les autres pays. Ils échangent et créent des liens ainsi que des alliances. Nous ne le faisons pas. Peut-être parce que nous avons une culture différente et aussi parce que nous faisons attention à nos déplacements et à nos cours. Cela nécessite un peu plus d’investissements. 

Ce sera l’un des axes de développement ?

Oui (il le répète plusieurs fois). Mais c’est pareil dans les instances nationales. Le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), le Comité paralympique et sportif français (CPSF), l’Agence nationale du sport (ANS) sont des espaces d’influence et de décisions où il faut être présent. 

En octobre dernier, vous avez été élu président de la FRATRI (Association des Pays Francophones de Triathlon). Les deux rôles peuvent-ils être combinés ?

Ils sont complémentaires. La présidence de la FRATRI permet de créer de nouvelles alliances et de nouveaux liens au niveau international et de contribuer au développement du triathlon dans les pays francophones. La Fédération française de triathlon est la première contributrice à la structuration et au développement de la FRATRI. Nous investissons dans cette fédération francophone avec des moyens humains et financiers. Elle permet à la France de rayonner au niveau international. 

Quels seront les premiers gros dossiers sur lesquels vous allez vous pencher dès le début de l’année 2025 ?  

La mise en place de la nouvelle équipe fédérale et le changement de DTN (la Direction Technique Nationale). Ce seront les deux gros dossiers. Il y aura aussi la poursuite de l’évolution du modèle économique de la fédération avec la recherche de partenaires, c’est-à-dire dégager de nouvelles ressources pour éviter d’augmenter les charges qui pèsent sur les clubs, les licenciés et les organisateurs. Nous allons donc continuer la recherche de partenaires et le développement d’activités commerciales.

La Fédération française de triathlon compte aujourd’hui 65 000 licenciés. Dans quatre ans, combien aimeriez-vous qu’il y en ait ?

Nous allons nous rapprocher des 75 000 très vite. Nous allons faire un bond en avant. Mais raisonnablement, je vais dire 80 000-85 000 licenciés.

Plusieurs fédérations ont eu des difficultés à accueillir les nouveaux licenciés à la rentrée de septembre. Est-ce que cela a aussi été votre cas ?

Cela dépend des régions et de la taille des clubs. Il n’y a pas de réponse affirmative complète sur le sujet. Même si certains clubs ont fermé leurs adhésions et ont dû refuser des personnes, trois éléments jouent en notre faveur. La première est que nous sommes une fédération de triathlon et disciplines enchaînées. C’est-à-dire qu’il y a des activités que vous pouvez faire sans les créneaux de natation. Certains clubs ont, par exemple, développé des activités de raid, de duathlon, de triathlon familles ou de triathlon loisirs qui ne nécessitent pas forcément beaucoup de créneaux natation et qui permettent d’accueillir du nouveau public. Le second point est que 70 % de nos clubs sont des petits clubs, avec un effectif de 55 ou 60 licenciés. Le potentiel d’accueil est encore possible. Enfin, il y a eu des créations de clubs, et plus il y en a, plus nous avons cette capacité à augmenter notre nombre de licenciés. 

Un grand nombre de triathlètes pratique également le sport de manière libre. Comment faire pour qu’ils se licencient ?

Je vais vous surprendre, mais ce n’est pas spécialement un objectif de notre part. En 2024, la fédération est passée de 150 000 à 200 000 Pass Compétition. Et sur ces 200 000 Pass Compétition, 165 000 sont des pass uniques, qui se transforment très peu en une licence annuelle. C’est un public difficilement captif. Je préfère raisonner en termes de pratiquants qu’en termes de licenciés, parce que, dans les pratiquants, je mets les licenciés annuels, les Pass Compétition, ceux qui ont une licence découverte et ceux qui participent à nos programmes comme « Rentrée=Bougez ». Raisonner en termes de pratiquants offre une diversité des publics et chacun trouve sa place.

 

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