Les Championnats du monde Ironman fêteront ce samedi 13 octobre leurs 40 ans. En 1978, ils n’étaient que 12 à se présenter au départ de ce défi un peu fou. Quatre décennies plus tard, ils seront 2500 à s’élancer depuis le Pier de Kona. Près de 96 000 athlètes auront tenté d’arracher leur qualification à cette finale mondiale durant l’année 2018, sur l’une ou l’autre des quarantaines d’étapes Ironman à travers le monde. Seule une poignée de privilégiés, donc, auront la chance d’affronter le mythe. L’Europe représentera 46% du peloton, devant l’Amérique du Nord (34%), et la zone Asie Pacifique (8%). Les Etats Unis seront la nation la mieux représentée, avec 640 athlètes groupes d’âge, devant l’Allemagne (240), et le Royaume Uni (120). La France fait bonne figure, avec 110 représentants qualifiés chez les groupes d‘âges, dont 9 féminines, et deux tenants du titre, Antoine Méchin et Christophe Lemery, qui tenteront de conserver leur couronne dans leur catégorie.
Du côté des Elites, l’édition 2018 se déroulera sans Jan Frodeno (ALL), vainqueur en 2016 et 2015, mais victime d’une fracture de fatigue. L’Allemand sera au bord de la route pour assister au spectacle que donneront ses habituels rivaux.
Le tenant du titre, Patrick Lange (ALL), 32 ans, n’a pas fait une saison 2018 tonitruante, en terminant derrière Frodeno à Francfort et sur l’Ironman 70.3 de Kraichgau. Mais 2017 avait été analogue pour lui, ce qui ne l’avait pas empêché de tout exploser à Kona.
Son compatriote Sebastian Kienle, 34 ans, devrait sans doute encore être placé, s’il n’est pas gagnant, comme en 2014. Régulier à Kona, « l’Uber Biker » s’est placé à cinq reprises dans le Top 4 sur les 6 dernières éditions. Il maîtrise donc cette course si particulière, et s’il réussit à sortir un combo vélo –course à pied comme il l’a fait en juillet dernier sur le Challenge Roth (à savoir 4h07 en vélo et 2h47 à pied), la victoire ne devrait pas être loin.
Lionel Sanders, le Canadien, avait été l’attraction de l’édition 2017. Dans son style pédestre peu académique mais visiblement efficace, il avait pu terminer 2e de l’épreuve. Forcément, il sera très attendu (trop ?) cette année, et voudra confirmer son statut. Le Canadien s’est fait discret cette saison, préférant travailler dur à l’entraînement, notamment en natation, et s’offrant tout de même deux succès sur les ironman 70.3 de Pucon et St George.
Javier Gomez sera la grosse cote du jour. Multiple champion du monde sur Courte distance, l’Espagnol a voulu sortir de sa zone de confort et se confronter à l’Ironman après avoir tout gagné sur DO. Réussira-t-il aussi bien que Frodeno, issu du même sérail olympique ? Pour son premier Ironman, à Cairns, cette année, il a tout simplement réalisé un Sub8, terminant 2e de l’épreuve derrière Braden Currie (AUS). Mais rares sont les rookies à triompher d’emblée à Hawaii. Le dernier fut Luc Van LIerde en 1996 !
Côté outsiders potentiels, on n’oubliera pas, entre autres, Fred Van Lierde (BEL). Souverain à Nice, dominateur à l’Alpe d’Huez, le Belge semble avoir digéré une année 2017 psychologiquement difficile, après son agression en Afrique du Sud, et il se présentera avec la fraîcheur d’un jeune premier et l’expérience d’un vainqueur (en 2013). Il enchaînera là sa 11e participation consécutive à Hawaii !
Cameron Wurf (AUS), lui, tentera de faire mieux qu’un super vélo. L’ancein rameur olympique et cycliste pro a fait d’énormes progrès à pied, sur marathon. Celui qui s’entraîne régulièrement avec le team Sky affiche une confiance déconcertante sur ses capacités à triompher à Kona (voir notre interview dans TRIMAG 81) ; il sait désormais courir en moins de trois heures, après avoir fait un « gros » vélo. Reste à savoir s’il arrivera assez frais à Kona après une grosse saison, et un rythme effréné à l’entraînement.
Chez les filles, on ne se demande plus qui va gagner, mais qui pourra battre Daniela Ryf. La Suissesse a encore été impressionnante cette saison à chacune de ses sorties. A Francfort, elle dominait Sarah True (USA), première dauphine, de 26 minutes. Il y a quelques semaines, elle remportait un 4e titre de Championne du monde Ironman 70.3. Même son entraîneur, Brett Sutton, pourtant avare de compliments, la désigne comme l’athlète la plus rapide de tous les temps sur Ironman.
La nageuse-rouleuse Lucy Charles (GB), pourrait jouer les trouble-fête, comme l’an dernier où elle avait terminé 2e. On observera aussi avec intérêt le le retour à Kona de Mirinda Carfrae (AUS), triple vainqueur de l’épreuve, de retour après une grossesse, et 2e à Cairns en début d’année pour son retour sur la distance.
Côté français, on prend quasiment les mêmes que l’an dernier, et on recommence.
Cyril Viennot sera le fer de lance tricolore, grâce à sa 5e place récoltée en 2014. Sa qualification pour cette édition anniversaire aura été plus compliquée, et l’aura contraint à courir beaucoup, pour entrer dans les points du KPR. 3e à Lanzarote, 5e aux Mondiaux ITU, vainqueur du 70.3 Perou, et auteur d’un Sub 8 à Copenhague lui offrant sa qualification définitive en août dernier, le Franc Comtois termine mieux la saison qu’il ne l’avait commencée…
Romain Guillaume a passé 3 semaines à Kona avant l’épreuve, pour optimiser son acclimatation. Lui aussi aura enchaîné les compétitions en 2018, avec des hauts et des bas. Le Jurassien comptabilise ainsi un abandon à Lanzarote, une 2e place au Luxembourg (70.3), une 4e place à Nice (Ironman), une 8e à Embrun, et une victoire sur le Half de Knokke (BEL), juste avant de partir à Hawaii.
Denis Chevrot, pour sa part, a « rôti » durant 25 jours à Tucson, Arizona, pour parfaire sa condition avant d’atterrir à Kona. C’est l’un des Frenchies à avoir le moins couru cette année, avec une 2e place à Aix (70.3), une 5e à Cairns (IM) et une 6e à Tallin (IM).
Antony Costes, lui, découvrira l’ambiance hawaiienne cette année. Lui a assuré assez tôt sa qualification, grâce notamment à sa victoire sur l’Ironman Barcelone fin 2017, et une autre en début d’année sur le 70.3 de Monterrey. Les autres courses ne furent donc que du bonus, et du bonheur, avec notamment cette 2e place sur l’Ironman France de Nice en juin. Il aura par contre abandonné sur ses deux dernières sorties, en France sur les 70.3 Vichy et Nice.
Côté féminin, les chances tricolores seront défendues par Manon Genêt, très en vue durant sa première saison chez les Pros. L’Aixoise a ainsi terminé 3e de l’Ironman Nice, et a remporté les 70.3 de Aix et Nice en 2018, et enfilera pour la première fois un dossard Elite à Kona.
Par Luc Beurnaux – Photos Thierry Sourbier, Korupt Vision, Kelvin Trautmann