Parce que pour une certaine frange de la population triathlétique, le format Ironman ne suffit plus, ou qu’il a pris une tournure trop populaire, on constate le succès des épreuves dites « extrêmes ». La plus connue d’entre elles reste le Norseman…

Comme un retour aux sources, à la rudesse d’un effort brut, rustre, sans paillettes, dans des conditions météo souvent difficiles, pour pimenter un défi Ironman devenu au fil des ans et des multiplications d’épreuves, peut-être trop galvaudé aux yeux de certains.… C’est la raison du succès des épreuves de triathlon dites « extrêmes », dont la plus iconique reste le Norseman. Un type d’épreuve qui se mérite plus que toute autre dans le milieu du triathlon. Les organisateurs en jouent d’ailleurs, en prévenant d’emblée lorsqu’on s’intéresse à leur épreuve : « Ceci n’est pas fait pour toi » peut-on ainsi lire sur la page d’accueil du site web de l’évènement. « Rien de personnel. Mais c’est comme ça. C’est pour les personnes qui ont de la combativité. De la résilience. Et des esprits plus forts que leurs corps. Ils ne cherchent pas à être les meilleurs. Tout ce qui leur importe, c’est de se surpasser. Ils ne font pas dans les fioritures. Pas de chichis. Pas d’édulcorant. Ils poursuivent quelque chose de plus grand. Avec leur équipe derrière eux, un sourire aux lèvres. Si cela te parle, alors peut-être que nous avions tort à ton sujet. »

Norseman Triathlon

Un mode de communication, entre humour et provoc’, aussi pour désacraliser l’enjeu

Ce genre d’épreuve ne propose pas des milliers de dossards, mais quelques centaines, grand maximum (255 exactement pour le Norseman 2024). Et il faut souvent s’y reprendre à plusieurs fois pour avoir le droit d’y participer. Le tirage au sort est la seule issue pour avoir le droit de plonger, à 5 heures du matin, depuis le ferry ancré au fond du fjord de Eidfjord, en Norvège. C’est l’image phare du Norseman, avec celle de l’arrivée jugée à plus de 1850m d’altitude.

L’épreuve norvégienne a en effet initié ce mouvement des épreuves « extrêmes », en 2003. Depuis, le concept a bien essaimé, au point de se développer au sein d’un circuit baptisé XTri, aux épreuves toutes aussi folles, radicales, atypiques, les unes que les autres. « On voulait que l’expérience vécue sur cette course importe plus que le chrono réalisé sur la ligne d’arrivée » explique ainsi Hårek Stranheim, l’un des fondateurs du Norseman. « J’ai voulu créer une course totalement différente, en faire un voyage à travers les paysages les plus magnifiques de la Norvège, où l’expérience soit plus importante que le temps d’arrivée, et permettre aux participants de partager leur expérience avec leur famille et leurs amis, qui constitueront leur soutien. Que la course se termine au sommet d’une montagne, pour en faire le triathlon longue distance le plus difficile de la planète ! » résume l’intéressé.

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En réaction aux épreuves traditionnelles, trop aseptisées….

Un triathlon plus qu’une aventure, avec 3,8km de natation dans un fjord à 13 degrés, puis 180km de vélo dont 5 cols à franchir, avant de finir par 42km de course à pied (et 1 600m D+).

Un nouveau genre d’épreuve, qui a déplacé le curseur de la difficulté un peu plus vers le haut, en réaction, souvent, aux épreuves traditionnelles, jugées trop aseptisées, et finalement trop accessibles aux yeux de ces « puristes ».

La dimension « collective » peut aussi expliquer ce succès, puisqu’on s’embringue dans cette aventure à plusieurs. Les accompagnateurs doivent gérer la logistique d’avant course (comme organiser le voyage ou trouver un hébergement, qui n’est pas une sinécure dans ce coin reculé de la Norvège, dont le départ est à plus de 320 km d’Oslo, et l’arrivée à 230km), mais aussi l’assistance pendant la course. En vélo, le véhicule suiveur peut, entre le 20e et 142e km, ravitailler son coureur, lui donner des affaires de change… Ce triathlon extrême « sublime » le rôle de l’assistant puisque tout repose sur lui (ou elle) : ravitaillements, vêtements de change, réparation vélo, encouragements, accompagnement…

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Notamment sur les 17 derniers kilomètres d’ascension, sur des pentes à 10%, sur un terrain montagneux, menant au sommet du Gaustatoppen (1 880 m). Si tout va bien. Car les barrières horaires sont une menace pernicieuse. Si celle dans l’eau et à vélo se gèrent relativement facilement, il en est tout autrement de la course à pied. Seuls les 160 premiers arrivés sont autorisés à s’engager sur ces 17 derniers kilomètres de course à pied, les plus exigeants du parcours (une portion joliment surnommée Zombie Hill). Ici, le coureur pourra bénéficier du soutien d’un accompagnateur, dont le physique sera donc mis à rude épreuve. Il devra suivre son coureur, et non le devancer pour ne pas influer sur son rythme de progression, et arriver au maximum une minute après lui sur la ligne d’arrivée. A ces conditions, et seulement celles-ci, le duo sera déclaré finisher, et pourra récupérer son ultime récompense, après 5000m de D+ avalés sur la journée : un tee-shirt noir de finisher ! Les autres, moins rapides, seront dirigés vers Gaustablikk, privés de l’ascension, et recevront le T shirt Blanc de finisher !

Chasse gardée des Norvégiens

Pendant longtemps, l’épreuve a vu le succès des athlètes locaux, plus habités, sans doute, aux conditions si spécifiques des lieux, et peut-être plus durs au mal ? Entre 2003, date de la première édition, et 2023, pas moins de 16 Norvégiens l’ont emporté, dont les trois éditions de 2021 à 2023 pour le seul Jon Sæverås Breivold. Sur les 20 premières éditions, les Norvégiens ont même réalisé 12 triplés sur le podium, et les Norvégiennes 5. De quoi ne laisser que les miettes à l’adversité venue de tous les horizons, et même des rangs des triathlètes pros du circuit « traditionnel ». C’est ainsi qu’en 2011, l’Américain Tim DeBoom, double vainqueur de l’IRONMAN Hawaii en 2001 et 2002 accrochait son nom au palmarès, ou qu’en 2023, l’autre légende de l’IRONMAN Sebastian Kienle (ALL) terminait 2e de l’épreuve. Mais rares sont les stars du circuit pro à venir se mettre en danger, en plein saison, sur le Norseman, course qui nécessite aussi une préparation spécifique et toute une organsiation logistique. Côté français, ils ont trois (en 2024) à avoir eu le talent de monter sur le podium de l’épreuve : Romuald Lepers en 2007 (2e), Aurélien Le lay en 2024, et Sandra Fantini en 2005.

 

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